Mesures pour le ferroviaire, caisse de branche, AFS… du concret avec la CFDT !
La CFDT Cheminots était reçue le 26 juin par le secrétaire d’État Jean-Baptiste Djebbari. L’occasion de remonter les conséquences économiques de la crise sur le secteur ferroviaire ainsi que les blocages du dialogue social de branche. La CFDT a obtenu plusieurs engagements du gouvernement formalisés dans un courrier. Décryptage.
Une intervention de l’État synonyme d’échec dans un contexte d’ouverture à la concurrence qui se matérialise chaque jour davantage : la dénonciation de l’accord de branche relatif aux classifications & à la rémunération par les trois organisations syndicales du front du refus (CGT, SUD-RAIL et FO) a littéralement laissé les salariés sans protection.
Le patronat n’en demandait pas tant
En effet, l’accord dénoncé fixait la définition des métiers et les niveaux de rémunérations minimales associés. Sans ce cadre conventionnel, c’est la loi du plus offrant et un dumping social décomplexé qui l’emporte fatalement au détriment, bien évidemment, des conditions de travail et de vie des cheminots. L’accord négocié et signé par la CFDT apportait indubitablement du plus pour tous les cheminots, quel que soit leur collège, leur métier ou la nature de leur contrat de travail.
Mais pourquoi cette dénonciation si ce n’est pour satisfaire des postures ?
Pas besoin de nous promettre le monde des licornes en pyjama ! Qui peut y croire après la mise en cause du statut, de la structuration du GPF en SA et du régime spécial de retraite ? Cela fait maintenant 17 ans que l’ouverture à la concurrence dans le secteur du fret ferroviaire nous a été imposée par les pouvoirs publics, sans que nous puissions y mettre un terme.
Pendant ce temps-là, l’étau de l’ouverture à la concurrence se resserre sur la SNCF et quatre appels d’offres ont été publiés
- Par l’État, sur les dessertes TET Nantes-Lyon et Nantes-Bordeaux.
- Par les régions PACA, Hauts de France et Grand Est pour le TER.
Alors oui, l’ouverture à la concurrence n’est pas bonne pour le secteur ferroviaire ! Abandonner les cheminotes et les cheminots sans aucune protection n’est pas responsable. Ce ne sera jamais la ligne de la CFDT Cheminots !
Des centaines de cheminots de SNCF Voyageurs ont reçu un courrier les avisant que les lignes sur ou pour lesquelles ils travaillent faisaient l’objet d’un appel d’offres et qu’ils faisaient partie du périmètre des agents potentiellement transférables selon les dispositions de la loi Nouveau pacte ferroviaire.
Les concurrents de la SNCF affûtent leurs armes et préparent leurs réponses à ces appels d’offres
Sur le marché de la grande vitesse, ils homologuent en ce moment même leurs rames et ont déjà réservé leurs sillons. La loi d’orientation des mobilités, promulguée le 26 décembre 2019, a de surcroît offert la possibilité aux régions de pouvoir récupérer en propre la gestion de certaines petites lignes (UIC 7 à 9). Deux régions politiques Grand Est et Centre ont déjà conclu un accord avec l’État. Sur le périmètre de la région Grand Est, ce transfert de gestion concernera 300 cheminots de SNCF Réseau.
Avis aux organisations syndicales dénonciatrices : l’heure n’est plus aux logiques d’appareils syndicaux !
Les cheminotes et les cheminots ont besoin d’une branche ferroviaire forte et d’organisations syndicales responsables comme la CFDT Cheminots pour les défendre et gagner de nouveaux droits positifs.
La CFDT Cheminots, une nouvelle fois décisive
Devant le secrétaire d’État, la CFDT Cheminots a défendu sans relâche la nécessité immédiate d’un plan de relance pour le secteur ferroviaire.
Il faut agir immédiatement
- Pour le fret ferroviaire, qui fait face à une situation économique et sociale extrêmement alarmante.
- Pour les circulations internationales, comme Eurostar, très fortement impactées par cette crise.
- Pour SNCF Réseau, qui a subi de plein fouet l’attrition des plans de transport.
La CFDT Cheminots a demandé que ce plan de relance du secteur ferroviaire soit accompagné d’accords, dont un accord de sécurisation de l’emploi, des compétences et des parcours professionnels mis en place au niveau de la branche ferroviaire et des entreprises afin de préserver l’emploi, qui risque fort d’être au centre des enjeux dans un automne social qui s’annonce déjà comme brûlant.
La CFDT Cheminots est également intervenue auprès du secrétaire d’État pour demander que le calendrier d’ouverture à la concurrence soit revu et détendu afin de tenir compte de l’état économique et social du secteur. Le cadre social n’est, en effet, pas stabilisé et de nombreuses négociations devront être conduites avant de pouvoir y parvenir. D’un point de vue économique, la crise du Covid-19 a heurté durement les acteurs du secteur et les échéances rapprochées de l’ouverture à la concurrence des services de voyageurs posées par la loi Nouveau pacte ferroviaire vont fatalement venir accroître ce déséquilibre.
Enfin, la CFDT Cheminots a interpellé le secrétaire d’État sur la poursuite des travaux menés au niveau de la branche ferroviaire après l’épisode de dénonciation de l’accord sur les classifications & la rémunération.
La CFDT Cheminots a demandé à l’État de prendre ses responsabilités en redonnant rapidement l’impulsion nécessaire à la construction d’une convention collective de haut niveau, qui se pose comme un véritable outil de régulation du secteur et un rempart protecteur pour les salariés de la branche ferroviaire.
La CFDT Cheminots a ainsi plaidé pour une branche ferroviaire renforcée et intégratrice, renouvelant sa demande de rattachement de la restauration ferroviaire à notre convention collective.
À la suite de ces échanges, le secrétaire d’État aux Transports a transmis vendredi dernier à l’ensemble des organisations syndicales représentatives ainsi qu’à l’UTP un courrier contenant des annonces importantes qui répondent à plusieurs revendications anciennes de la CFDT.
Décryptage CFDT du courrier du secrétaire d’État aux Transports
#1
L’État use de son pouvoir réglementaire pour mettre en place un cadre de référence en matière de classifications et de rémunération : « (…) compte tenu de l’importance des enjeux et soucieux du respect de l’équilibre social de la branche, le gouvernement a ainsi décidé qu’il utilisera cette possibilité afin de donner un cadre de référence applicable à l’ensemble des entreprises de la branche en s’appuyant sur le contenu de la recommandation patronale adoptée par l’UTP ».
La loi Nouveau pacte ferroviaire prévoyait, en effet, une disposition permettant à l’État d’intervenir au niveau de la branche ferroviaire en cas d’échec des négociations collectives. Celle-ci avait été prorogée par le gouvernement dans le cadre de la loi d’orientation des mobilités. L’État décide ainsi d’étendre à l’intégralité des entreprises de la branche ferroviaire la recommandation patronale adoptée le 11 juin dernier dans le cadre du Conseil d’administration de l’UTP. Cette recommandation patronale se situe à un niveau très inférieur à l’accord de branche négocié et signé par la CFDT (voir ou revoir le tract Recommandation patronale classif’ & rému’ en cliquant ici).
Les marchands de vent du front du refus viennent ainsi de faire perdre aux cheminots 67 millions d’euros ou plutôt les faire économiser à la direction de la SNCF… 67 millions d’économies pour la direction du GPU au titre des dispositions de l’accord de branche qui sont tombées (mise en place d’une prime d’ancienneté de branche pour tous les cheminots, quel que soit leur collège, revalorisation des heures de nuit, etc.).
L’État entérine ainsi le fait de consolider temporairement une partie des dispositions de l’accord dénoncé via une ordonnance qui devrait paraître dans le courant de l’été. Toutefois, cette dernière ne sera qu’une jambe de force provisoire destinée à soutenir l’édifice et à permettre aux entreprises d’engager une transposition de cette recommandation. Cela se fera malheureusement sans les mécanismes protecteurs que la CFDT était parvenue à imposer au sein de l’accord de branche dénoncé.
La CFDT saura prendre ses responsabilités au moment où les négociations de l’accord sur les classifications & la rémunération reviendront sur le devant de la scène pour récupérer les droits perdus à la suite de la dénonciation et en conquérir de nouveaux, comme un 13e mois conventionnel ou une meilleure rémunération des heures de travail le dimanche et les jours fériés.
#2
L’État acte l’extension des missions de la CPRP et la transforme en caisse de branche : « (…) afin de vous permettre de démarrer les négociations sur le régime de prévoyance de la branche, le gouvernement a tiré les conclusions du rapport de la mission relative à l’avenir du régime spécial de prévoyance géré par la Caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la SNCF. Le gouvernement a ainsi retenu le scénario nº 5 en validant le principe d’une extension des missions de la caisse de prévoyance et de retraite pour en faire une véritable caisse de branche, sans ce que cela n’entraîne de modification du périmètre du régime spécial ».
C’était une revendication de longue date que la CFDT Cheminots a toujours portée seule. Le statut s’est construit autour d’une protection sociale adossée aux contraintes professionnelles.
L’arrêt des recrutements au statut, entériné par la loi Nouveau pacte ferroviaire, impose de poser désormais ce socle commun au niveau de la branche, avec un régime de protection de santé et de prévoyance porté par une seule et même caisse de branche.
Dans le cadre du conflit du printemps 2018 et des discussions sur le nouveau pacte ferroviaire, la CFDT a défendu l’instauration d’un système de protection sociale géré par la CPRP, dont tous les salariés de la branche bénéficieraient, indépendamment de leur statut d’emploi ou de leur employeur.
En intervenant à plusieurs reprises auprès de l’État, des différents ministères, de la CPRP et de la SNCF, la CFDT a agi pour garantir la pérennité de la Caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la Société nationale des chemins de fer français (CPRP SNCF) et améliorer la protection sociale de tous les cheminots.
La CFDT a défendu cette option auprès des différentes composantes de l’État, dont certaines étaient partisanes d’une abrogation pure et simple du régime spécial et de la CPRP au profit d’une convergence avec le régime général.
Cette décision pérennise non seulement la CPRP et les missions de ses salariés, mais également le régime spécial de prévoyance cheminot. La CFDT continuera de défendre avec force l’extension du régime spécial à l’intégralité des salariés de la branche ferroviaire, accompagnée d’un accès à la médecine de soins SNCF.
#3
L’État inscrit également les négociations de l’accord de branche relatif à la prévoyance à l’agenda social : « (…) par ailleurs, des sujets importants doivent encore faire l’objet de négociations au niveau de la branche : le régime de prévoyance avec la mise en place d’un dispositif paritaire d’action sociale de branche et la mise en œuvre d’un haut niveau de garanties dans le domaine de la santé ».
L’accord relatif à la prévoyance comporte des enjeux extrêmement importants pour la CFDT Cheminots.
Partant notamment du constat que 96 % des salariés en France bénéficient aujourd’hui d’une couverture complémentaire santé et prévoyance prise en charge par l’employeur et les agents au statut n’en bénéficient pas à l’instar des salariés contractuels de la branche ferroviaire, la CFDT revendique :
- la mise en place d’un accord d’entreprise SNCF étendant un haut niveau de garanties complémentaires à tous ;
- un accord de branche ferroviaire harmonisant le niveau minimal de ces garanties, quelle que soit l’entreprise et garantissant une prise en charge des cotisations par l’employeur au moins égale à 60 %.
Cela représente une différence de plusieurs milliers d’euros de salaire indirect dont bénéficient aujourd’hui les salariés en CDI, mais pas les cheminots au statut. Il est grand temps de corriger cette inégalité.
La CFDT porte de surcroît une ambition très forte de construire des dispositifs conventionnels en matière de prévoyance permettant de couvrir pleinement une réalité propre à la branche ferroviaire, qui se caractérise par de très nombreuses aptitudes et habilitations spécifiques. Cela concerne les salariés de la branche dont le métier intègre une ou plusieurs tâches de sécurité et les conducteurs de train.
Afin de renforcer la cohésion de branche, de lever des difficultés en cas de transferts éventuels et de rassurer le personnel en donnant une perspective positive au nouveau cadre social, la CFDT revendique la mutualisation de l’Action sociale au sein de la branche, garantissant ces différentes spécificités et assurant la portabilité des droits des agents.
#4
L’État lance une mission d’étude sur le maintien des facilités de circulation : « (…) au regard de la complexité technique du sujet facilités de circulation, suite à la demande de plusieurs organisations syndicales et de l’organisation professionnelle représentatives de la branche, j’ai décidé de solliciter les ministres en charge de la santé et des finances afin que soit lancée dès que possible une mission d’inspection sur les modalités du maintien des facilités de circulation en cas de transfert ».
Le patronat du ferroviaire se limite à une vision très réductrice du maintien des droits relatifs aux FC en souhaitant que celui-ci soit accordé uniquement aux cheminots transférés excluant de fait leurs ayants droit.
La CFDT Cheminots défend à l’opposé la mise en place de FC universelles pour l’ensemble des salariés de la branche, y compris les nouveaux embauchés auprès de l’ensemble des opérateurs.
Afin de sortir de l’ornière et de clarifier certains éléments en lien avec des éléments d’ordre législatif ou fiscal, la CFDT a porté dans le cadre du paritarisme de branche et devant l’État (sous la forme d’une motion prise en Commission paritaire nationale) la nécessité que les services de l’État puissent expertiser certains sujets en amont des négociations.
Le secrétaire d’État répond favorablement à cette demande et engage une mission d’inspection selon le même schéma que celle qui avait été mise en place pour la CPRP.
#5
L’État rétablit les cheminots dans leurs droits en matière d’AFS grâce à l’action de la CFDT : « (…) enfin, je tenais également à vous informer que suite à l’annulation contentieuse par le Conseil d’État des dispositions relatives à l’assiette de la garantie de rémunération du décret nº 2018-1242 du 26 décembre 2018 relatif au transfert des contrats de travail des salariés en cas de changement d’attributaire d’un contrat de service public de transport ferroviaire de voyageurs, le décret rectificatif intégrant les allocations familiales supplémentaires dans cette assiette sera prochainement publié ».
Dans le cadre de ses actions sur la réforme ferroviaire de 2018, la CFDT Cheminots avait obtenu un amendement à la loi prévoyant que l’ensemble des allocations soit pris en compte dans la rémunération minimale due aux cheminots en cas de transfert dans une autre entreprise. Le décret publié le 26 décembre 2018 ne respectait pas cet engagement puisqu’il ne prenait pas en compte l’allocation familiale supplémentaire.
Pour la CFDT, il n’était donc pas envisageable que cet élément ne soit pas maintenu en cas de changement d’employeur. La CFDT Cheminots a été la seule organisation syndicale à engager une procédure devant le Conseil d’État pour garantir le maintien intégral de la rémunération des cheminots (voir ou revoir le tract AFS en cliquant ici).
L’État prend finalement acte de la victoire de la CFDT devant la haute juridiction dans ce courrier du secrétaire d’État aux Transports et s’engage à publier un décret rectificatif.
Cet ensemble d’engagements n’est pas un aboutissement. Il s’agit cependant de jalons indispensables à la construction d’un cadre social de branche de haut niveau que la CFDT revendique depuis plusieurs années. Il est grand temps que la contractualisation porteuse de nouveaux droits pour les cheminots l’emporte sur l’obstruction stérile.
Je consulte le courrier-réponse du ministère en cliquant ici